J’aimais ce garçon

Aujourd’hui j’aimerais prendre le train en sortant du travail. Sans savoir où aller. J’étais attachée à cette vie parce que j’aimais ce garçon et maintenant qu’il est parti, je n’ai plus goût à tout ce qui fait mon quotidien. Je sais qu’ici personne ne m’ouvrira sa porte pour que je puisse pleurer autrement que seule. Au moins, le train, lui, me bercerait et je serais contenue dans son habitacle. On lit souvent dans les romans que tout peut être bousculé en une seconde. C’est vrai. Tout explosa le jour où le garçon inversa tout ce qu’il avait dit jusqu’alors. Il m’avait retournée comme un gant de vaisselle. Ma vie ne me servait plus à rien vu que je n’étais plus moi. J’allais enfin aller me perdre au bord de la mer.

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Si je n’avais pas su que c’était l’amour, je l’aurais pris pour une épée nue, et il m’aurait tuée, le filou.
Mais quand sa présence vint me percer, je me sentis légère, genre je suis une bulle de savon. Parce que je sus que tout ce qui me chamboulait dans ces torrents de sang chaud, sentant les flots dans mes veines libérées, c’était l’amour. Pas l’amour dont on parle, dont ils parlent à l’extérieur, pas leur discours pour t’amadouer afin de te domestiquer, mais l’amour qui, pour eux, est une épée nue, parce que recevoir ce flot, pour eux, c’est être percuté par le tranchant d’un glaive, alors qu’il s’agit de leur réveil, le réveil de la mort dans laquelle ils se croient vivants. L’amour n’a pas le goût de l’amour, c’est ça qu’ils ignorent, et moi, je sus quand je le regardais m’affranchissant de toute peur.

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C’est un temps passé, je te le jure.
Plus je lui disais ça, plus que je savais que c’était faux. J’aimais bien le répéter tel un mantra pour conjurer le sort, pour foutre en l’air le semblant de cohérence ou plutôt une idée de maîtrise. Il avait envie de me débrider, il veillait à ce que je ne sois plus domestiquée. Son arrivée dans ma vie, ça avait fait comme un petit trou, je me sentais du caoutchouc mou quand il arrivait vers moi. Il éradiquait le passé douloureux et le futur blanc. Il était un explorateur viking qui avait traversé les mers calmes. Qui chevauchait mes résistances en n’écoutant pas les mantras que je proférais et quand bien même, ainsi de cette manière, coulait une bleue renaissance sur nos corps allongés sur le sable mouillé.