Puis-je t’aider à assouvir cette faim ?

Une escadrille de sales meufs débarqua dans le bar. Elles étaient venues par les pistes cyclables. Johnny resta placide à leur arrivée. Il avait arrêté la rationalisation depuis longtemps, ça ne payait plus comme avant. Il s’était mis à fréquenter les rades tard le soir. Ça lui permettait d’oublier la joliesse de sa bien-aimée qui avait été assassinée la semaine passée.

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Seule j’ai marché sur cette plage
Où j’attendais le retour de l’être
Unique en mon coeur
La lune rythmait l’écoulement du temps
Amoureuse je tenais debout et
Gagnait patiemment en maturité
Et puis tout s’accéléra
Ma vie bascula
Et je me retrouvai échouée
N’attendant plus rien, goûtant la beauté du rivage
Tranquille.

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Elle s’étendit à plat ventre sur le tapis, tout le monde s’arrêta de parler. Elle avait quelque chose à dire. Quelque chose de grave et de beau.
De par son histoire, elle savait que son seul pouvoir à interrompre le cours de l’Histoire passait par son corps. Luigi voulut s’élancer vers elle :
– Non.
Car il savait ce qu’elle avait enduré depuis que ses parents l’avaient jetée hors de chez eux. Mais Luigi se retint. Il resta immobile.
Et eux, ces messieurs de la cour n’avaient jamais vu ça. Ils ne savaient pas ce que c’était de dormir dehors dans l’enfance,
ils ne savaient pas ce que c’est de frapper à une porte avec une question au bord des lèvres,
ils ne savaient pas ce que c’était d’avoir faim. Et pourtant on lui voyait les côtes, à elle étendue par terre
À peine avaient-ils arrêté de parler qu’on entendit le frémissement du taffetas de la robe de la reine qui arrivait.
Et c’est avec un silence souverain qu’elle entra,
Des anneaux
Accrochés à ses oreilles.
Le jour déclinait. 
Mais la lumière restait forte, comme scintillent les étoiles que l’on découvre en mer.
« Tu seras entendue » dit la reine à la catin à terre.
Celle-ci sourit.
Un homme se démarqua du groupe en avançant d’un pas. Il dit : « Tu sens l’animal sauvage. » Il la saisit par la taille et l’emmena avec lui. Elle se débattit, le mordit au cou. Il resserra l’étreinte jusqu’à la coller contre son corps. La reine les regardait, en plissant les yeux, les lèvres au bord de son sourire, ravageur de cette infinie tendresse que rien du pouvoir n’avait entaché.
Elle le savait un homme de confiance. Elle le savait éperdue d’elle, contre les vents, même en revenant des guerres. Il tenait la fille à l’agacer, ça la calmait. Il fallait juste attendre quelques minutes.
La reine lui proposa de l’écouter. Il la lâcha. Mais curieusement elle resta près de lui.
– J’ai faim.
La reine lui dit :
– N’as-tu point à manger ?
– J’ai faim d’un plaisir que je n’ose pas vous avouer.
– Puis-je t’aider à assouvir cette faim ?